Logo-Resonances-Lyriques
Menu
Der Vogelhändler (L’Oiseleur) l’œuvre emblématique du théâtre musical populaire autrichien au Festival Lehár de Bad Ischl

Der Vogelhändler (L’Oiseleur) l’œuvre emblématique du théâtre musical populaire autrichien au Festival Lehár de Bad Ischl

mardi 15 août 2023
(c) Foto Hofer

Carl Zeller un compositeur autrichien contemporain de Johann Strauss

Aujourd’hui quasiment inconnue en France, Der Voglhändler (L’Oiseleur) est une ravissante opérette du compositeur autrichien Carl Zeller (1842-1898) qui fut un contemporain de Johann Strauss. Très souvent jouée dans les pays de langue germanique les Festivals de Morbisch, de Baden et cette année de Bad Ischl, ont tour à tour mis à l’affiche cette œuvre  sorte d' « emblème » du théâtre musical populaire autrichien puisque composée au Tyrol auquel elle emprunte son dialecte et sa rythmique. 
Der Vogelhändler a été créé au Theater an der Wien 10 janvier 1891 sur un livret de Moritz West et Ludwig Held d'après le vaudeville français Ce que deviennent les roses de Charles Varin et Edmond Desnoyers de Biéville créé au Théâtre du Palais Royal à paris le 20 février 1857). La musique, vive et plaisante, se situe dans l’esprit de ce que pouvait être l’opéra comique français du XIXè siècle, dans le style d'un Adam ou d'un Delibes mâtinés de Johann Strauss tous trois exactement contemporains de Carl Zeller avec, de surcroît, chez ce compositeur les accents langoureux de la valse viennoise, emblématique de ce type d’œuvre (le duo ténor soprano « Rosen in Tirol » « Roses du Tyrol », suivi de l’ensemble qui conclut l’acte I en est l’exemple caractéristique).(1)

L’argument de Der Vogelhandler

L’action se situe au XVIIIè siècle dans un village sur le Rhin. Les habitants sont en émoi car leur Prince Electeur a fait savoir qu’il viendrait sous peu chasser le sanglier. Or, les braconniers du village ont exterminé ce gibier. Le baron Weps, en situation financière délicate saisit cette occasion pour proposer aux villageois un stratagème qui abusera le Prince lequel finalement se décommande. Le baron Weps décide alors de faire passer Stanislas, son neveu – qu’absolument personne ne connaît dans le bourg – pour le Prince Electeur. Mais, la Princesse Marie, épouse du Prince Electeur, arrive au village, déguisée en paysanne, pour surveiller ce qu’elle pense être l’escapade volage de son inconstant conjoint. S’ébauche alors un flirt entre la princesse et le joyeux oiseleur ambulant Adam, fiancé de la jolie postière Christel. De son côté cette dernière veut obtenir du Prince un poste de directeur de ménagerie de la cour pour Adam. Les circonstances lui offrent l’occasion d’une telle opportunité puisque Stanislas apparaît sous les habits du Prince Electeur…De là vont découler un véritable imbroglio et une série de contretemps qui finiront par se dénouer pour offrir un final heureux à l’ensemble des protagonistes.

Une scénographie festive et joyeuse 

De part et d’autre de la scène, côté cour des panneaux représentent un paysage pastel avec des roses tandis que côté jardin sont réunis les éléments sommaires d’un bureau de poste. Le premier tableau se déroule pendant la nuit avec un groupe de chasseurs revêtus de vêtements empruntés à des peaux de bêtes. L’ambiance sombre est liée sans doute à l’arrivée du Prince Electeur qui vient chasser le sanglier alors que les habitants ont épuisé la réserve de gibier. La scène change rapidement (décors de Sabine Lindner) transportant les spectateurs à l’intérieur d’une taverne sous un éclairage ensoleillé. La metteure en scène Anette Leistenschneider entretient tout au long de l’ouvrage une atmosphère festive et joyeuse. Sa mise en scène, enlevée et pleine d’humour, n’exclut ni une certaine poésie ni le soin porté au moindre détail. Les costumes de Sven Bindseil s’accordent parfaitement avec la scénographie et ne manquent ni d’allure ni de fantaisie Soulignons également l’élégante chorégraphie de Katharina Glass.

Des interprètes sachant manier avec brio humour et art vocal

En exubérant Adam, l’oiseleur (David Sitka) déploie une énergie réjouissante (mais il en sera de même pour tous les autres artistes et ceci pour les trois ouvrages à l’affiche) sachant en outre faire alterner dans son chant verve et nostalgie poétique. Les éléments masculins du ballet qui l’entourent exécutent avec lui une danse folklorique tyrolienne. A la fin du premier acte paraît sur scène un pavillon entièrement constitué de verdure et dans lequel va se situer l’imbroglio de toute la pièce (la Princesse Marie y supposant son époux en galante compagnie, tandis qu’Adam pense que sa fiancée Christel le trahit avec le Prince Electeur). Tous les interprètes maîtrisent un très haut niveau technique vocal, ce qui donne lieu à un final exceptionnel, agrémenté d’une très jolie chorégraphie. 
Le ballet ouvre le deuxième acte dans le château du Prince où domestiques hommes et femmes agitent plumeaux et chiffons. Les deux professeurs Suffle (Ivo Kovrigar) et Würmchen (Tomaž Kovacic) censés faire passer à Adam son examen pour le poste de directeur de la ménagerie sont dignes de Laurel et Hardy tandis qu’Adélaïde (Patricia Nessy), la femme de compagnie de la Princesse, continue à faire son numéro époustouflant de « séductrice comique » entamé dès le premier acte transformant ainsi un rôle secondaire en véritable premier emploi. Avec son timbre lumineux Jenifer Lary dessine une charmante Christel qui après son air d’entrée particulièrement apprécié au premier acte, se révèle à nouveau fort charmante dans son duo avec la Princesse Marie. Cette dernière incarnée par Corina Koller démontre que dans ce pays, on peut aisément passer de l’opéra à l’opérette.
  
Des mélodies envoutantes parmi les plus célèbres de l’histoire de l’opérette viennoise

La musique de Zeller est, au demeurant assez proche de celle de son contemporain Johann Strauss. On s’émerveille de l’un des airs les plus célèbres du répertoire autrichien et applaudi comme il sied ici, à savoir « Roses du Tyrol » ébauché tout d’abord par le ténor, puis par la soprano et repris par l’ensemble des interprètes et du chœur. 
A la fin de l’acte 2 un air est dévolu au ténor (« Wein mein Ahnl »)  sur le rythme d’une valse lente avec son envoûtant refrain « No amal, no amal sing nur sing, Nachtigall » (« Chante encore, encore, chante et chante rossignol ») accompagné par un chœur à bouches fermées, qui exige un art du phrasé et un legato remarquables. En écoutant cette partition servie par d’excellentes voix, on se croit revenu à la grande époque des enregistrements de l’âge d’or de l’opérette viennoise ! Dans le jardin du château à l’acte 3, la princesse Marie se voit gratifiée d’un solo sublime «Als geblüth der Kirschenbaum» (« Comme le cerisier en fleurs ») qui précède le duo comique entre l’autoritaire et roué Baron Weps (Gerd Vogel) et l’effervescente Adélaïde suivi par un trio entre Adam, Christel et le désopilant Stanislas (excellent Jonathan Hartzendorf en ténor bouffe) qui introduit le dénouement de l’intrigue et remet les couples en ordre, avant que trois cerceaux fleuris ne descendent des cintres accompagnés d’une pluie de confettis sur la reprise du célèbre « Roses du Tyrol ».
L'orchestre n’est plus à louanger pour ses qualités justifiant qu’une multitude d’enregistrements discographiques (de la firme CPO) aient été réalisés en ces lieux. Il interprète avec beaucoup de souplesse une partition dans laquelle alternent la transparence mozartienne mais aussi l'allant des valses entraînantes à la manière de Johann Strauss. Sous sa baguette experte, Marius Burkert entraîne sa phalange et le chœur avec un extrême professionnalisme
Une mention très spéciale doit être attribuée au chœur, formée exclusivement de jeunes éléments (mais c’est une tradition à Bad Ischl) et qui s’investissent avec un dynamisme, un engouement, une joie de jouer qui ne peut que subjuguer. Encore une fois, on est bien dans un pays où l’opérette a su non seulement conserver son large patrimoine mais encore susciter un plaisir réciproque entre public et plateau. Au demeurant, les trois ouvrages qui ont été représentés à plusieurs reprises on fait des salles combles. Ceci en dit long sur l’amour que porte l’Autriche à son répertoire musical d’art lyrique léger

Marie-Catherine Guigues
15 août 2023

Pas moins de 7 films ont été tirés de cette opérette entre 1911 et 1967

Direction musicale : Marius Burkert
Mise en scène : Anette Leistenschneider
Chorégraphie : Katharina Glas
Décors : Sabine Lindner
Costumes : Sven Bindseil
Conception lumière : Johann Hofbauer

Adam, L’oiseleur : David Sitka
Princesse Marie : Corina Koller
Christel, Jenifer Lary
Baron Weps, maître de chasse : Gerd Vogel
Le Comte Stanislas, son neveu : Jonathan Hartzendorf
Adélaïde, dame d’honneur : Patricia Nessy
Suffle (Professeur) : Ivo Kovrigar
Würmchen (Professeur) : Tomaž Kovacic

Orchestre, Chœur et Ballet du Festival Lehár de Bad Ischl

Imprimer
Cookies
Nous utilisons des cookies. Vous pouvez configurer ou refuser les cookies dans votre navigateur. Vous pouvez aussi accepter tous les cookies en cliquant sur le bouton « Accepter tous les cookies ». Pour plus d’informations, vous pouvez consulter notre Politique de confidentialité et des cookies.