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Il Paese dei Campanelli au Teatro Coccia de Novara : quand l’opérette italienne fait sonner ses clochettes…

Il Paese dei Campanelli au Teatro Coccia de Novara : quand l’opérette italienne fait sonner ses clochettes…

vendredi 29 septembre 2023
© Mario Finotti

L’occasion est rare d’assister à une opérette italienne, le répertoire étant bien moins étendu que celui des opérettes françaises ou viennoises. Autre originalité, la dernière édition du Festival della Valle d’Itria à Martina Franca mettait l’été dernier une opérette à son affiche, genre très peu représenté jusqu’à présent par la manifestation. On peut tout de même citer le rarissime Coscoletto de Jacques Offenbach donné dans les Pouilles en 2019 ou encore La Grande-Duchesse de Gérolstein en 1996, avec la regrettée Lucia Valentini-Terrani. Il s’agit cette fois du titre Il Paese dei Campanelli, proposé, pour le centenaire de sa composition, monté donc en coproduction par Festival della Valle d’Itria et le Teatro Carlo Coccia de Novara.

Les compositeurs Carlo Lombardo et Virgilio Ranzato s’étaient mis à deux pour écrire la partition, le livret étant de la main du premier, cette opérette en trois actes connaissant un succès considérable à partir de sa création en novembre 1923 au Teatro Lirico de Milan. Ce Paese dei Campanelli est un village où chaque maison est surmontée d’un clocher doté de clochettes, celles-ci sonnant si un adultère survient dans l’habitation. En somme, une espèce d’assurance-fidélité obligatoire dans ce pays de cocagne, les couples infidèles étant immédiatement visibles et pointés du doigt par tous. Mais un navire anglais vient accoster, ses marins débarquent et les intrigues amoureuses se lient bien vite. Les clochettes sonnent frénétiquement en fin de premier acte quand les villageoises s’abandonnent aux visiteurs, puis c’est le « match retour » un acte plus tard, lorsque les maris trompés prennent leur revanche auprès des femmes de marins venues pour se venger. La conclusion est plutôt douce-amère et s’écarte du "happy end" attendu généralement dans ce répertoire : les couples initiaux se reforment, en particulier l’officier Hans et sa femme Ethel qui quittent les lieux à bord du bateau, laissant à quai l’amoureuse Nela désespérée qui crie ses derniers mots déchirants « Hans ! Hans ! ».

Le metteur en scène Alessandro Talevi et sa décoratrice Anna Bonomelli ont choisi de transposer le village hollandais du livret en un lieu plus exotique, inspiré du Cocoanut Grove dans l’Ambassador Hotel de Los Angeles, club des années 1920 qui accueillait quelques célébrités d’Hollywood. Sur le plateau sont disposées des tables et chaises, ainsi que plusieurs palmiers verts. Des cloisons à gauche limitent l’espace, tout comme une paroi d’aspect métallique à droite qui figure le flanc du navire, percées de portes qui permettent les entrées et sorties des artistes. Un petit podium est aménagé au centre, sur lequel les huit danseurs et danseuses interprètent les joyeuses chorégraphies réglées par Anna Maria Bruzzese. Il y a beaucoup de vie et de naturel dans ce décor unique, l’ensemble formant un élégant et grand spectacle qui vaut le détour. 

Entre les dialogues, pas spécialement envahissants dans le déroulé du spectacle et par ailleurs discrètement sonorisés, certaines jolies mélodies restent durablement dans l’oreille, au sortir de la représentation. Il faut dire que le chef Roberto Gianola parvient à une très belle qualité de musique, équilibrée entre tous les pupitres, en particulier en évitant de laisser les cuivres, souvent généreusement sollicités, couvrir les autres collègues instrumentistes. 

A l’exception d’un titulaire, la distribution vocale est la même que celle entendue à Martina Franca en juillet dernier, avec quatre rôles chantés principaux. Les deux premiers rôles féminins sont défendus par des chanteuses rompues au grand répertoire lyrique et disposant en conséquence de beaux moyens pour chanter cette opérette. On peut citer d’abord Francesca Sassu en Nela, soprano de format lyrique qui pousse par moments son instrument pour nous faire partager ses élans amoureux. Le personnage de Bombon semble plus déluré et l’autre soprano Maritina Tampakopoulos s’en empare avec énergie et humour, par exemple quand elle déclare vouloir se rendre au Japon, cette nationalité étant parmi les trois qui manquent encore à sa collection d’amoureux. Sollicitée en chant seulement en fin de représentation, Silvia Regazzo dans le rôle d’Ethel, épouse de Hans, s’exprime avec moins d’ampleur. 

Côté masculin, le ténor Norman Reinhardt développe une élégante ligne de chant, mettant tous les atouts du côté de Hans pour séduire la belle Nela. Comme son nom l’indique, La Gaffe commet plusieurs bévues au cours de l’intrigue, rôle interprété par Francesco Tuppo (au lieu de Matteo Macchioni à Martina Franca), autre ténor drôle et expressif. Les emplois rôles parlés de maris trompés, puis trompeurs, sont tenus avec un humour bien dosé, y compris Federico Vazzola qui est travesti en Pomerània, la femme d’Attanasio. Les chœurs de l’AsLiCo sont aussi bien chantants, se présentant en tenue davantage coloniale que de marin ce soir, et participent à cette belle réussite d’ensemble.

Irma FOLETTI
29 septembre 2023

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Il Paese dei Campanelli, opérette de Carlo Lombardo et Virgilio Ranzato
Novara, Teatro Coccia le 29 septembre 2023

Direction musicale : Roberto Gianola
Mise en scène : Alessandro Talevi
Décors et costumes : Anna Bonomelli
Chorégraphie : Anna Maria Bruzzese
Chef des chœurs : Massimo Fiocchi Malaspina
Chœurs AsLiCo
Orchestra Filarmonica Italiana

Bombon : Maritina Tampakopoulos
Nela : Francesca Sassu
Ethel : Silvia Regazzo
Pomerània : Federico Vazzola
Hans : Norman Reinhardt
La Gaffe : Francesco Tuppo
Attanasio Prot : Stefano Bresciani
Tarquinio Brut : Fabio Rossini
Basilio Blum : Pasquale Buonarota
Tom : Leonardo Alberto Moreno

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