Logo-Resonances-Lyriques
Menu
Rigoletto aux Chorégies d’Orange

Rigoletto aux Chorégies d’Orange

samedi 8 juillet 2017
Leo Nucci, Cornelia Oncioiu et Nadine Sierra photo Philippe Gromelle

Cet été encore les Chorégies d’Orange sont vouées à Verdi avec, en juillet, « Rigoletto » et, en août, « Aïda ». Concernant la première de ces oeuvres, c’est l’Orchestre Philharmonique de Radio France qui officie. Incontestablement une magnifique phalange, mais on doit toutefois se demander si son chef, le finlandais Mikko Franck, est, en la circonstance, l’homme de la situation et s’il possède véritablement une affinité parfaite avec l’art lyrique. Déjà sa direction de « Carmen » avait été contestable et contestée. Ici trop de « symphonisme » et de sophistication finissent par trahir l’oeuvre de Verdi (passons, pour une formation de cette qualité, sur un couac incongru du clarinettiste solo !). On en vient à regretter les maestros d’antan qui étaient aussi de remarquables chefs de chant devant le désintérêt que portent aujourd’hui certains aux interprètes qui sont sur le plateau. A la deuxième représentation, et à cause d’un malaise survenu peu avant la représentation, Mikko Franck était remplacé au pied levé par Alain Guingal (bravo pour la performance !) et le chef avignonnais, qui a dirigé les plus grands et enregistré notamment « Rigoletto » en DVD avec Alfredo Kraus, se montre bien plus à l’aise que son prédécesseur.
Pour ce qui concerne la scénographie d’Emmanuelle Favre, elle est constituée par un seul et énorme objet qui occupe l’immense plateau du Théâtre Antique, à savoir la marotte qu’est sensé agiter Rigoletto lorsqu’il est revêtu de ses oripeaux de bouffon. Un indubitable symbole mais qui tourne vite au système et qui, de surcroît, est peu efficace, en particulier au dernier acte, ne traduisant d’aucune manière la scène qui se passe dans le repère de Sparafucile au bord du fleuve Mincio. De belles lumières de Jacques Rouveyrollis et vidéos de Virgile Koering viennent, fort heureusement, sauver la platitude de ce dispositif. Ainsi la maison de Gilda au deuxième tableau est assez évocatrice (un jardin d’une villa véronaise avec ses colonnes, ses murs ocres et un immense arbre dont les feuilles sont en mouvement). Bien sûr la transposition de l’ouvrage au XXème siècle ne surprend plus personne puisque cela, avec l’envahissement du « Regietheater », est devenu une mode systématique – parfois agaçante – sinon un tic. Mais passons car, incontestablement, les costumes sont d’une certaine élégance. Quant à la mise en scène de Charles Roubaud, elle s’inscrit dans un processus classique mais sans véritable
inventivité, surtout lorsque on la compare avec celle d’Ezio Toffolutti au mois de Mai à l’Opéra de Nice qui fourmillait d’idées et de détails fort justes, véritable leçon de théâtre.
A 76 ans Léo Nucci tire encore son épingle du jeu grâce notamment à son registre aigu qui est demeuré partiellement intact. On en a bien sûr la démonstration dans le duo « Si vendetta … » qui, selon une tradition désormais bien établie, est systématiquement bissé, pour peu que les protagonistes fassent preuve d’une certaine vaillance. Toutefois, en plein air, la voix paraît moins glorieuse que voici seulement quelques années (on pense notamment à ses « Vêpres siciliennes » que nous vîmes à Parme, ou encore à son « Paillasse » à l’Opéra de Monte-Carlo). Le médium est parfois faible et certains graves quasi-parlando. A ses côtés Nadine Sierra, qui a successivement triomphé dans Gilda à la Scala de Milan et à l’Opéra de Paris, subjugue par sa beauté, sa présence, ses dons innés de comédienne et, surtout, par la chaleur de son timbre et la clarté d’une voix dont la richesse de la palette est un bonheur. A 29 ans seulement la soprano américaine est, ce soir-là, la reine de la fête. Le ténor Celso Abello campe un duc de Mantoue brillant, délivrant à l’acte 3 un contre-ré tenu dans sa cabalette. Excellent Stéphane Kocan dans un Sparafucile imposant. La solide Maddalena de Marie-Ange Todorovitch ainsi que le sonore Borsa de Christophe Berry sont des atouts sur lesquels on peut compter. En seulement quelques mesures, Amélie Robins se distingue tout particulièrement dans la comtesse Ceprano, venant confirmer son excellente prestation, quelques semaines seulement auparavant, dans « Musiques en fête » en Gilda et Reine de la nuit. Une mention à la mosaïque des choeurs composée par les excellents artistes des Opéras d’Avignon, de Monte-Carlo et de Nice.

Christian Jarniat
8 juillet 2017

Imprimer
Cookies
Nous utilisons des cookies. Vous pouvez configurer ou refuser les cookies dans votre navigateur. Vous pouvez aussi accepter tous les cookies en cliquant sur le bouton « Accepter tous les cookies ». Pour plus d’informations, vous pouvez consulter notre Politique de confidentialité et des cookies.