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Les Frères Karamazov au Théâtre Anthéa Antibes

Les Frères Karamazov au Théâtre Anthéa Antibes

mercredi 23 novembre 2022
©Simon Gosselin

D’abord, il y a Fiodor, Fiodor Dostoïevski. Le maître de ces lieux. L’écrivain, le philosophe, l’inspiré, l’inspirant. Celui qui exhibe les mœurs de société. Celui qui, au travers de ses personnages, noie les aspirations les plus nobles – amour, foi, humanisme, fraternité, dignité …- dans les traits les plus bas des caractères, désespérément humains : mensonge, jalousie, cupidité, orgueil, ivrognerie, violence, honte, humiliation, trahison…
Dans ce comble de la misère humaine émerge parfois une étincelle : « La laideur des femmes n’existe pas » lance le vil personnage du père lui aussi prénommé Fiodor, excessif, truculent, libertin et arpenteur de nuits arrosées « Même dans la plus moche, il y a toujours quelque chose de bien. Il faut simplement le chercher ». 

Les frères Karamazov c’est, dans son essence, cette incontournable, voire insupportable question du sens de la vie, de l’identité humaine, et donc de l’existence de Dieu. « Je peux aimer l’humanité » explique Ivan, l’intellectuel des trois frères à son frère moine Aliocha, « mais pas l’individu… Je reste avec le fait » poursuit-il,  « J’ai décidé de ne pas comprendre ». Les tirades nous tirent dessus : « Si j’étais Dieu, je pardonnerais », tandis que nos yeux s’écorchent sur la pancarte plantée dans le scénario scénographique : « Dieu est mort, tout est permis ». 

A l’honneur il y a donc l’auteur Fiodor Dostoïevski. Puis il y a celui qui lui rend hommage : le metteur en scène, le créateur de l’œuvre théâtrale, l’accoucheur du chef-d’œuvre ! Celui qui a lu, relu, écrit, réécrit, joué, improvisé, cherché le texte par les mots, les relations, les essais des comédiens sur le plateau. Celui-là, c’est Sylvain Creuzevault, le penseur de la pièce et l’intellectuel de la tribu romanesque : Ivan (le second frère). Sylvain Creuzevault, le talentueux architexte de ces jeux, celui qui décide que l’entre-acte soit un autre acte entre les scènes, entre les frontières, entre les gens. Sur cette pièce de trois heures quinze éclairant un ouvrage de mille trois cents pages, comment s’arrêter ? Les spectateurs qui le souhaitent se déportent vers la porte, tandis que les autres, une grande majorité, se trouvent happés par l’ombre scénographique de premier plan qui envahit l’espace. A la porte du ciel cette fois, Staretz, l’abbé, nous confesse son vécu. Un piano s’anime dans la fosse musicale d’avant-scène, flûte ambulante, bières débordantes offertes à qui veut. Tout est permis, oui !!!

Ensuite, il y a la scène, la formidable scène anthéatrale, où poussent les germes humains. On se délecte du talent déroutant de chacun des interprètes, dans un décor qui colle à ce point à l’esprit de l’auteur que l’on croit le lire. Les lumières s’animent comme autant de pièces maîtresses de l’œuvre du maître. 

Trois heures quinze ? Non, quelques minutes à peine ! Véritable prouesse de la mise en scène, des artistes et de toute l’équipe de ce spectacle, visible et invisible, qui nous tient en haleine du début à la fin…si fin il y a ! Car en matière de sentiments humains, s’il y a un début, y a-t-il une fin ? Chapeau bas à Fiodor Dostoïevski si admirablement interprété !

Adaptation et mise en scène : Sylvain Creuzevault.
Avec :
Sylvain Creuzevault, Servane Ducorps, Vladislav Galard, Arthur Igual, Sava Lolov, Frédéric Noaille, Patrick Pineau, Blanche Ripoche, Sylvain Sounier
et les musiciens (création musique) Sylvaine Hélary, Antonin Rayon.
Traduction française : André Markowicz , dramaturgie : Julien Allavena,
Scénographie : Jean-Baptiste Bellon
Costumes : Gwendoline Bouget  
Lumière : Vyara Stefanova et vidéo : Valentin Dabbadie 

Nathalie Audin
23 novembre

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