Logo-Resonances-Lyriques
Menu
Lakmé à l’Auditorium Rainier III de Monte-Carlo

Lakmé à l’Auditorium Rainier III de Monte-Carlo

vendredi 9 décembre 2022
Cyrille Dubois et Sabine Devieilhe © Alain Hanel- OMC

On se demandait ce que pouvait être une version de concert de Lakmé tant cet opéra inspiré des récits de Pierre Loti, dans la veine orientaliste en vogue au XIXe siècle, véhicule des images d’un exotisme aux parfums capiteux avec sa forêt profonde et impénétrable, ses fleurs odorantes, sa végétation luxuriante, ses pagodes mystérieuses, ses sources limpides, ses temples tapis au fond des grands bois silencieux, ses défilés religieux à la gloire de Dourga et sa toute petite cabane en bambous pour abriter en son nid les amours interdites de la fille du brahmane et de l’officier anglais…   Ici, ce soir, pas de costumes, pas de décors, pas de mise en scène, pas de pas de danse. Juste le son – merveilleux – de cet opulent et magnifique Orchestre Philharmonique de Monte-Carlo, déchaînant sa puissance pour dialoguer avec le chœur lorsqu’il s’agit de mettre en œuvre les sombres projets du brahmane rebelle Nilakantha (par la voix incisive et cuivrée du baryton Lionel Lhote), ou libérant sa tendresse lorsque ce même père désire « retrouver le sourire » de sa fille « et dans ses yeux revoir le ciel ». Cette même phalange sait tout aussi bien confiner au diaphane pour se faire complice de Gérald rêvant de l’adorable inconnue en dessinant ses bijoux abandonnés (« ce cercle d’or d’un petit pied qui ne se pose que sur la mousse ou sur les fleurs »). Poésie, style, nuances, art de détailler les mots dans la voix suave du ténor Cyrille Dubois… un vrai délice !   Cet orchestre admirable, messager de l’inépuisable richesse mélodique de Léo Delibes, plante ainsi le décor à chaque pas du drame sous la direction précise et inspirée de Laurent Campellone, capable de s’effacer au profit de l’œuvre, de se fondre en elle, de devenir elle. Humble et noble serviteur de ce roman sonore qu’il anime de sa baguette “magique” en changeant les instruments en forêt d’oiseaux, en marché grouillant, en amour étourdi, il lie le rêve à la réalité, l’inexprimable au palpable, l’indicible à l’audible.   L’excellente Fleur Barron fait vibrer les chaleureuses harmoniques d’un violoncelle dans Mallika tandis que, côtoyant l’élégant Frédéric de Pierre Doyen, Erminie Blondel et Charlotte Bonnet rivalisent de charme mutin en Ellen et Rose chaperonnées avec humour par Mistress Bentson (Svetlana Lifar). Et puis, il y a Sabine Devieilhe en Lakmé, idéale de voix et d’inspiration, déesse lyrique au zénith de son art, maîtresse sublime des sons éthérés, des notes piquées, des aigus cristallins, des pianissimi séraphiques. Est-ce un oiseau, une flûte ?… C’est cela et tout autre chose. C’est l’immaculé d’une rose, la fraîcheur d’une source, le printemps de l’amour s’éveillant à la sensualité, la jeunesse divine, l’ineffable poésie… L’absolu ? Oui, résolument. Les spectateurs retiennent leur souffle. Le silence infini de l’auditoire est suspendu à ses lèvres par son chant raffiné, son incarnation fascinante et bouleversante.
Moments de grâce suprême qui chavirent les cœurs avant que ne déferlent les acclamations sans fin d’un public subjugué. Nathalie Audin 9 décembre 2022

Imprimer
Cookies
Nous utilisons des cookies. Vous pouvez configurer ou refuser les cookies dans votre navigateur. Vous pouvez aussi accepter tous les cookies en cliquant sur le bouton « Accepter tous les cookies ». Pour plus d’informations, vous pouvez consulter notre Politique de confidentialité et des cookies.