On entend parfois dire que la musique classique et l’opéra sont en perte de vitesse. Allez donc à la « Folle journée » de Nantes, vous serez persuadé du contraire. Rien de tel qu’un passage à la Folle journée pour vous remonter le moral !
La « Folle journée » garde son nom originel au singulier mais se décline au pluriel. Elle s’étale sur… cinq jours. Cette année, c’était du 31 janvier au 4 février. Il est exaltant de voir pendant ces cinq jours des milliers de personnes, de tous âges et toutes conditions sociales, se précipiter vers le Centre de congrès, conquérir le grand le hall, submerger les escaliers roulants, envahir les couloirs, faire déborder les salles de concerts.
La Folle journée de Nantes est due à un génie de l’organisation musicale classique : il s’appelle René Martin.
On fêtait cette année les trente ans de la manifestation. Des chiffres ? 256 concerts (Oui, vous avez bien lu : deux cent cinquante six concerts), 1 500 artistes, 132 000 spectateurs payants, 10 000 scolaires, 30 heures d’antenne sur France-Musique, 5 concerts diffusés sur Arte.
Qui dit mieux ? Au delà des chiffres, il y a l’enthousiasme de cette foule qui, du matin au soir, court de concert en concert, qui parcourt les couloirs un programme dans une main, un sandwich dans l’autre, et qui porte sur son visage l’image du bonheur.
Le thème de l’année était les « Origines ». Chaque artiste était allé puiser le plus loin possible dans son répertoire. Mais personne n’est allé aussi loin que l’ensemble Calliopée, dirigé par la Niçoise Karine Lethiec, qui, ayant jadis travaillé avec Hubert Reeves, proposa un concert intitulé Cosmosono en allant à la recherche des vibrations primitives de l’univers – de ces « ondes gravitationnelles que sont les vibrations créées au fin fond de l’univers et qui ont traversé le temps et l’espace ». On se trouvait au carrefour de l’art, de la science et de l’archéologie, dans un jeu de sonorités produites par des instruments classiques ou primitifs qui faisaient un lien entre la musique paléontologique et la musique contemporaine.
Bien sûr, on eut droit à des Mozart, des Beethoven, des Chopin, des Debussy ou Stravinsky à n’en plus finir, joués par des interprètes d’élite qui avaient nom Abdel Rahman El Bacha, Anne Queffélec, François-Frédéric Guy, Adam Laloum, Alexander Malofeev, Jean-Marc Luisada, Marie-Josèphe Jude, Dmitry Masleev, Nemania Radulovic, Pierre Antai, par d’innombrables trios, quatuors ou quintettes, par l’Orchestre National Bordeaux Aquitaine, Sinfonia Varsovia, l’Orchestre National des Pays de la Loire, l’Orchestre de Chambre Nouvelle-Aquitaine, l’Orchestre de Chambre de Mannheim.
Oui, un festival de folie!
André PEYREGNE