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Andalousie à l’Opéra de Nice

Andalousie à l’Opéra de Nice

samedi 25 septembre 2021
Sabrina Colomb et Jérémy Duffau / Photo Dominique Jaussein

  Comme pour nombre de théâtres, la saison de l’Opéra de Nice est formée pour partie du report des œuvres de la précédente saison. C’est ainsi que, dans le cadre du Festival d’Opérette et de comédie musicale de la Ville de Nice (sous la houlette de Melcha Coder, Conseillère en charge de la direction artistique), l’édition 2021-2022 de la saison lyrique s’ouvrait avec Andalousie de Francis Lopez, créée le 25 octobre 1947 au Théâtre de la Gaîté-Lyrique à Paris, avec en vedette Luis Mariano. La mise en scène en a été confiée à Carole Clin dont on connaît l’extrême professionnalisme dans le répertoire d’opérette classique ou moderne. Le parti pris adopté pour la scénographie de cet ouvrage est un dépouillement de bon aloi. Peut-on en 2021 encore présenter des opérettes à grand spectacle comportant plus de vingt tableaux différents comme on le faisait, il y a plus de 7O ans ? Et le faste qui constituait l’un des ingrédients de l’attrait du public du Châtelet ou du Mogador est-il aujourd’hui encore de mise pour une multitude de raisons (notamment budgétaires) ? Pour cette Andalousie, quelques praticables, des marches en fond de scène, un escalier en demi-lune côté jardin et trois imposantes arches qui se déplacent au fil des tableaux peuvent parfaitement faire l’affaire pour évoquer cette chaleureuse région du sud de l’Espagne, d’autant que Carole Clin et Bernard Barbero, responsable des Eclairages de l’Opéra, ont mis leur talent en commun pour des projections particulièrement suggestives : château imposant, arcades mauresques, cabaret typique, jardins exotiques ou fleuve bordant de riches palais, viennent ainsi illustrer les lieux décrits dans le livret de Raymond Vincy et Albert Willemetz. Nous avouons – et nous ne sommes pas les seuls – préférer ces projections (avec un aspect cinématographique) que de vieilles toiles peintes souvent défraîchies et qui sont d’un autre âge !

Si l’œil est ainsi satisfait, l’oreille est à la fête et ce, pour plusieurs raisons. L’orchestre Philharmonique de Nice réunit une trentaine de musiciens dont on admire la qualité et on voudrait souvent disposer d’une telle phalange en quantité et de pareil niveau pour le répertoire lyrique léger, d’autant qu’elle est accompagnée par la baguette experte de Bruno Membrey, dont la précision, l’élégance, la virtuosité et l’allant sont particulièrement appréciés par les amateurs du genre. Le deuxième sujet de satisfaction est la distribution dans laquelle nous retrouvions, in loco, pour la troisième fois, le brillant ténor Jérémy Duffau. Il nous avait déjà séduit dans le Chanteur de Mexico en 2016 ainsi que dans La Belle Hélène en 2017. Certes, son Sou-Chong du Pays du Sourire cet été à Lamalou-les-Bains nous laissait présager une excellente surprise, mais nous ne pensions pas trouver un interprète, qui est à l’heure actuelle sans rival pour le répertoire de Francis Lopez, dans un tel état de forme. Son Juanito brûle les planches non seulement par un physique de jeune premier et un abattage électrisant mais aussi une voix qui semble encore avoir gagné de l’ampleur dans tous les registres. De surcroît, difficile d’approcher aussi bien le style tout à fait particulier de cette musique et de ce chant, en conservant une articulation et une diction parfaite. A ses côtés l’excellente surprise a été constituée par la prise de rôle de Dolorès par Sabrina Colomb qui, n’avait jusqu’à présent jamais abordé ce type d’ouvrage, s’étant illustrée par ailleurs dans des rôles tels que Rosine du Barbier de Séville ou encore la Reine de la nuit de La Flûte Enchantée. Dotée d’un physique au charme idéal pour le rôle, telle une brune andalouse particulièrement piquante, elle se joue des difficultés dont la partition est parsemée avec des aigus brillants, aussi bien dans « La Légende du Linge » que dans la scène de l’ivresse du deuxième acte parfaitement maîtrisée, émaillant en outre le final de l’ouvrage de notes particulièrement haut perchées sans pour autant que dans d’autres séquences la voix ne se départisse jamais d’une belle couleur dans le médium et d’un timbre chaleureux. Une vraie réussite pour cette première qui lui ouvre très certainement, largement les portes de l’opérette et de ce type de répertoire. Fabrice Todaro (Pépé) et Julie Morgane (Pilar) constituent sans doute le couple de fantaisistes le plus connu et le plus prisé de l’hexagone et leur numéro est évidemment étourdissant. On a plaisir à apprécier Fréderic Cornille, un Valiente de luxe (il est l’un de nos grands Pelléas actuel et sera au mois de décembre Danilo de La Veuve Joyeuse sur cette même scène). Son air « Seul, je vais sur tous les chemins… » est admirablement phrasé. Fleur Mino est une Fanny Miller intrigante à souhait et Anny Vogel une Dona Vittoria haute en couleurs. Frédéric Scotto et Stéphanie Patou reprennent les personnages pittoresques de Baedecker et Greta qu’ils avaient déjà dessinés avec beaucoup d’humour au Théâtre de Verdure de Nice en 2011. Quant à Jules Grison qui a promené sur les scènes internationales le spectacle Formidable ! Aznavour il nous offre un autre aspect inattendu de la palette de ses multiples talents dans un Caratcho au comique irrésistible. Le chœur comme le ballet (chorégraphie Sophie Peretti-Trouche) ont contribué au succès de ce spectacle et aux nombreux rappels du public lors du final.

Christian Jarniat
25 septembre 2021

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