Un festival de tragédies car nous avons besoin de célébrer l’humanité dans ce qu’elle a de plus beau et de plus terrifiant : la puissance de l’âme, l’énergie sacrée des sentiments. L’écrin de l’amphithéâtre des Arènes de Cimiez nous permettra de magnifier le vivant en lui offrant un plateau à sa mesure sous l’immensité d’un ciel méditerranéen.
Ce rendez-vous des larmes, ce moment où le cœur s’ouvre pour crier son désir, son désarroi ou sa quête d’amour, nous le voulons de toutes nos forces. Il faut que le chagrin s’exprime pour qu’il nous laisse un cœur apaisé.
Ce rendez-vous du drame, nous avons besoin de le regarder en face pour qu’il nous réveille et nous libère des colères. Ce rendez-vous des monstres, issus des nuits de cauchemars, nous allons le magnifier, le braver, le recréer pour que nos pires angoisses se transforment en beauté.
Si nous espérons un temps de la légèreté et de la distraction que l’été nous offre en douceur, il est aussi un temps de la nuit étoilée où les hommes aspirent à pleurer dans l’intimité de leur chambre. Ils pleurent leurs amours disparues, le mal et les rêves perdus. Les auteurs mettent des mots sur cette peine qui court depuis des siècles, le théâtre nous donne à entendre ces pièces sublimes qui racontent le monde.
Un Festival de la tragédie pour partager des nuits denses et profondes.
La tragédie convoque sur le plateau nos peurs, l’effroi de la violence, l’inéluctable mort, tous les sentiments humains les plus exacerbés.
Depuis la nuit des temps, l’homme a besoin de mettre à distance ses excès, ses défauts, ses peines et ses amours pour les comprendre et les accepter. La scène est le piédestal absolu dont il a besoin pour célébrer la vie. Cette ultime cérémonie permet d’ouvrir nos cœurs à l’indicible, de le regarder en face. Encore une fois et plus que jamais, je dirais c’est parce qu’on le joue « pour de faux » que l’on peut y croire « pour de vrai ». Il n’est pas pensable de ne souhaiter que la distraction joyeuse pour passer le temps. Il nous faut également de la beauté, du chagrin et des larmes pour sentir nos cœurs vivants vibrer.
C’est pourquoi les grecs invitaient dans l’arène les plus grandes histoires de l’humanité. Dans l’écrin juste des arènes de Cimiez, il est essentiel de redonner à la ville ce rendez-vous puissant, unique en France un festival digne de notre histoire. C’est aussi une mémoire de ce que les anciens nous ont légué, leur regard sur l’humanité, des tragédies qui traversent les siècles et dont nous devons toujours nous inspirer.
Muriel Mayette-Holtz
Directrice du Théâtre National de Nice Centre Dramatique National Nice Côte d’Azur
