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Salomé 1949

Salomé 1949

dimanche 18 février 2024

Salomé 1949

Heureusement, la Salomé du Metropolitan Opera de New-York donnée le 12 mars 1949 a été enregistrée. Autant il faut avouer que le très fort accent nord-américain de Brian Sullivan en Narraboth et de Jérôme Hines en soldat gène leur compréhension, autant il faut reconnaître que l’orchestre de Fritz Reiner et la Salomé de Ljuba Welitsch résistent au temps.

Janssen aussi d’ailleurs. Il donne un Jocanahan incandescent de pureté, venu de sa haute gloire toute wagnérienne pour annoncer à un monde ne le comprenant pas la venue du Christ. Trop parfait dans un monde trop corrompu, il rejette le vice alentour, et avec lui l’impur amour de Salomé, droit et fier jusqu’à sa décollation.

Jagel, quant à lui donne un Hérode exemplaire. Essentiellement parlé-chanté, il faut un acteur solide pour éviter de disparaître entre deux monuments wagnériens, et Jansen y réussit avec la chaire sale, inquiète et lâche nécessaire au Tétrarque. Comme un bruit de fond sourd augmenté par un microphone, il incommode dans son rapport avec sa belle-fille et sa femme, immoral à souhait.

Si  Christel Goltz faisait entendre la croissance de l’hystérie chez Salomé, indiquant par-là que le drame commence sur scène, tout en révélant les relations familiales toxiques préexistantes au palais, Ljuba Welitsch joue une Salomé à l’hystérie inchangée durant tout l’opéra, signifiant que le drame achève une histoire engagée. Son chant irisé ne semble jamais en accord avec ceux des autres, n’appartenant pas véritablement à l’univers du Tétrarque. Elle n’y rentre d’ailleurs que pour demander la tête de Jocanahan et se faire tuer par les gardes. Cette Salomé fascinante de récursivité est le deuxième atout majeur de cette version.

Son atout premier, et le plus important, reste l’orchestre du Metropolitan Opera de New-York sous la direction de Fritz Reiner. Si Keilbeth maintient une approche apollinienne, Reiner lui en garde une dionysiaque. Son flux musical sec, touchant et acéré comme le fil d’une épée, lie l’opéra de bout en bout, en gardant l’apollinien de certaines scènes comme la sortie de prison de Jocanahan, la danse des sept voiles ou l’adresse à la tête décollée du prophète. De plus, au lieu d’accompagner les chanteurs, il les fait appartenir à son ensemble orchestral, comme dans une cantate ou une symphonie mahlérienne, et ainsi annonce certaines versions ultérieures comme celle de Karajan ou de Sinopoli.

Cette version montre que Fritz Reiner n’est pas qu’un grand straussien dans le répertoire orchestral mais aussi avec ses opéras.

Prochaine version Keilberth avec l’orchestre de Munich en 1952

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