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Quand les ensembles d’amateurs et les orchestres professionnels jouent Ravel

Quand les ensembles d’amateurs et les orchestres professionnels jouent Ravel

vendredi 17 janvier 2025

©Diaphana Distribution

Remarques sur « En Fanfare », un délicieux film d’Emmanuel Courcol, co-écrit avec quatre auteurs. Un survol de la France actuelle, incarnée par de remarquables acteurs et se posant à Lallaing, ancienne commune minière du Nord.

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Succès de la fin d’année 2024 et du début 2025, le film En Fanfare mérite de l’être. Ne boudons pas notre plaisir ! Reconnaissons aussi que c’est une joie plutôt rare que de regarder un film durant une heure quarante dans un état de bonheur absolu. On accepte de rire, puis on se laisse émouvoir. Emmanuel Courol et ses scénaristes ont parfaitement peaufiné l’écriture du scénario. Agissant avec perspicacité, ainsi qu’une tendre humanité, ils observent deux mondes s’affrontant.

Film-duel, film-miroir, deux frères sont adoptés, l’un à la naissance, Thibault, dans une famille bourgeoise de Meudon. Le second, Jeremy, rejoint à l’âge de trois ans une famille ouvrière du Nord de la France. Ils vont ainsi vivre deux destins dissemblables. Le premier parmi la France d’en haut, le second dans la France d’en bas. S’opposent ainsi la culture de l’élite et la culture populaire, le confort économique et une certaine précarité, la bonne santé et la maladie.

En fanfare photo 04 © 2023 Agat Films France 2 Cinema
© 2023 – Agat Films – France 2 Cinéma

Choc des mondes. Jimmy joué par le magnifique Pierre Lottin, est tromboniste dans une harmonie d’amateurs du Nord. Il va connaître un frère qu’il ne soupçonnait pas, Thibaut, chef d’orchestre de renommée internationale, interprété par le délicat et talentueux Benjamin Lavernhe. Mais un lien va rapprocher, réconcilier, unir ces deux êtres aux parcours si opposés : la musique. Cette rencontre improbable va les bousculer, sans doute même les transformer. « Dans une rencontre on perd un peu de soi, on gagne un peu de l’autre. », explique avec justesse la philosophe Laurence Devillers.

En Fanfare fait penser au meilleur des comédies sociales anglaises de Mike Leigh, Ken Loach ou Stephen Frears. On le doit au souci du détail, des décors, des costumes, de la distribution. Rien n’est laissé au hasard. Tout est soigneusement réfléchi.

Emmanuel Courcol accorde de l’importance à chaque rôle. Il se plaît à filmer les émotions qui se dégagent de toutes les situations, des plus banales aux plus tragiques, avec un vrai sens de l’humour. Les personnages, confrontés à des quotidiens disparates et souvent difficiles, ne sont jamais caricaturaux.

Courcol dirige ses acteurs avec la même exigence, des rôles principaux aux plus petits rôles. Sans que nous nous en rendions compte. Musiciens et musiciennes de la Fanfare communale de Lallaing se mêlent aux acteurs et actrices professionnels. Parmi ceux-ci figurent les formidables Sarah Suco et Jacques Bonnaffé.

Si Emmanuel Courcol permet à deux mondes qui s’ignorent de vivre ensemble, il connaît trop bien l’œuvre du sociologue Pierre Bourdieu pour avoir la naïveté de croire que l’inégalité des chances liée aux origines sociales puisse disparaître dans un futur proche. Le réalisateur est trop lucide pour cela. Du début à la fin, ce film entretient une saveur douce-amère.

Mais En Fanfare nous offre une lueur d’espoir, cela est rare. Alors, ne boudons pas notre plaisir !

Olivier Achard
17 janvier 2025

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