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Osterfestspiele – Baden-Baden : Une « ELEKTRA » d’exception à Baden-Baden

Osterfestspiele – Baden-Baden : Une « ELEKTRA » d’exception à Baden-Baden

samedi 23 mars 2024

© Monika Rittershaus

Avec Elektra, opéra en 1 acte de Richard Strauss, s’ouvre le Festival de Pâques au Festspielhaus de Baden-Baden, continuant ainsi l’exploration du répertoire de Richard Strauss (après la magnifique Frau ohne Schatten de 2023. Le public a été, encore une nouvelle fois, au rendez-vous dans une salle comble et « électrisée ».

L’action se déroule à Mycènes dans l’Antiquité. Avec son amant Egisthe, Clytemnestre a assassiné son mari Agamemnon. Leur fille Elektra dans une démence hystérique s’est plongée dans un abîme de revanche et attend le retour de son frère Oreste- qui s’est fait passer pour mort – pour qu’il soit la main du meurtre du couple criminel. 

Sa sœur Chrysothémis tente de la ramener à la raison mais cet appel se fracasse contre le mur de la folie d’Elektra. Après le double assassinat commis dans un fracas épouvantable, Elektra se lance dans une danse sauvage et, sa vengeance accomplie, meurt. 

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© Monika Rittershaus

Tandis que les metteurs en scène Philipp Stölz et Philipp M. Krenn se concentrent sur l’esthétique, Kirill Petrenko et les Berliner Philarmoniker mettent en valeur l’intensité émotionnelle de la tragédie lyrique de Richard Strauss. En effet, les deux metteurs en scène nous plongent dans des ténèbres brutalement mises en lumière, dans une tension proche de la folie, très éprouvante, mais si fascinante. L’immense scène du Festspielhaus est pratiquement fermée à partir de la rampe par un mur qui s’ouvre sur une fenêtre très longue, mais basse, une sorte de cage. De cette structure, des plateaux superposés tels des tiroirs coulissants avancent ou reculent , évoquant soit les étages d’une demeure sinistre, quasiment nue, soit les bas-fonds d’une usine désaffectée. C’est dans ces décors de prison mentale surdimensionnée ou très basse et très rétrécie par moments qu’évoluent les personnages de cette tragédie. Il est vrai qu’Hofmannsthal voulait pour Elektra un décor exigu, donnant cette impression d’enfermement sans possibilité de fuite. Stölz et M. Krenn y sont largement parvenus, donnant en permanence cette sensation de schizophrénie. En plus, chaque mot du livret est projeté sur les chanteurs ou sur les marches dont les arêtes évoquent soit les feuilles d’un cahier ou du papier à musique. Le procédé mis en scène reste toutefois très passionnant car les excès de cet opéra de la démesure scénique et musicale sont parfaitement restitués. De plus, la réduction de l’espace permet aux sonorités de s’épanouir comme rarement entendu dans cette immense salle avec autant de clarté la moindre nuance sonore d’une partition aussi riche et avec autant de couleurs. Ce que Kirill Petrenko à la tête des Berliner Philarmoniker a réalisé ce soir relève du prodige et de l’exception.

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© Monika Rittershaus

Quant au plateau vocal, il est du même niveau : exceptionnel tant vocalement mais aussi physiquement pour les chanteurs qui doivent lutter constamment contre une bonne centaine de musiciens pour se faire entendre, allant parfois jusqu’aux hurlements presque sauvages. Quelle performance !!! Le casting « d’enfer » est largement dominé par le trio féminin.

Nina Stemme campe une Elektra fabuleuse, à la chevelure rousse et bouclée. Même si ses aigus sont un peu altérés par l’âge, sa voix puissante, son dramatisme font d’elle une Elektra « héroïque ». Chantant par moments dans des conditions extrêmes, ses prouesses physiques et vocales, surtout dans la scène finale, forcent le respect et l’admiration. Celle qui est sans doute la plus grande Elektra de l’histoire, nous a confié le soir de la première que ce sera certainement l’une de ses dernières Elektra.

A ses côtés, la mezzo-soprano Michaela Schuster, dans le rôle de Clytemnestre, met bien en valeur les tourments et les angoisses nocturnes de la souveraine, avec une noirceur de timbre en parfaite cohésion avec son aspect physique.

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© Monika Rittershaus

Elza van den Heever (exceptionnelle dans Die Frau ohne Schatten sur la même scène l’an passé) est magnifique dans le rôle de Chrysothémis. Elle apporte à son chant une belle virtuosité, ce qui la rend majestueuse. Tout en elle respire la résilience, la recherche du bonheur, rendant son chant tellement lumineux.

Johann Reuter, avec une grande et belle voix, incarne le noble vengeur Oreste. Le reste de la distribution n’a pas à rougir et a été à la hauteur des rôles principaux. Une distribution de haut vol !!!

A souligner, la fin d’Elektra a été l’une des plus oppressantes, jamais entendues à Baden-Baden, due à cet espace métaphysique créé par Stölz et M. Krenn.

Les 2.500 spectateurs, totalement « électrisés » se sont levés comme un seul homme pour ovationner cette nouvelle production d’Elektra, mais tout particulièrement Nina Stemme, Kirill Petrenko et ses Berliner Symphoniker. Une première électrisante !!!

Marie-Thérèse Werling

23 mars 2024

Mise en scène : Philipp M. Krenn et Philipp Stöeltz

Direction : Kirill Petrenko

La distribution

Chlytemnestre : Michaela Schuster

Elektra : Nina Stemme

Chrystothemis : Elza van den Heever

Aegisth : Wolfgang Ablinger-Sperrhacke

Oreste : Johan Reuter

Berliner Philharmoniker BERLIN

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