Logo-Resonances-Lyriques
Menu
Opéra National du Rhin : LOHENGRIN, à… Bayreuth sur le Rhin !!!

Opéra National du Rhin : LOHENGRIN, à… Bayreuth sur le Rhin !!!

dimanche 10 mars 2024

© Klara Beck

Lohengrin n’a pas plus été donné à l’Opéra national du Rhin depuis 30 ans. Opéra de maturité, il représente encore la période de voyage et d’errance de Richard Wagner.

L’histoire de cet opéra est celle d’une société en crise. Elsa, l’héritière du Brabant, est accusée de fratricide et de conspiration par son ancien prétendant, Frédéric de Telramund. D’un geste de héraut royal, les trompettes sonnent la sentence : un champion est appelé à combattre l’accusateur pour prouver devant Dieu, l’innocence d’Elsa . Alors qu’Elsa tombe à genoux en prière, apparaît dans un halo de lumière un chevalier étincelant sur une barque tirée par un cygne. Celui-ci accepte de la défendre, à condition qu’elle ne lui pose jamais de questions sur ses origines. C’est le « Frageverbot » du 1er acte. Mais comment ne pas succomber à la curiosité devant un tel miracle ?

Pour ce Lohengrin, l’Opéra National du Rhin a confié la mise en scène au jeune metteur en scène français Florent Siaud, qui s’est fait connaître au Québec, dans des projets de théâtre et d’opéra.

Événement essentiel pour cette production : la prise de rôle et les débuts wagnériens du ténor (bariténor comme il aime dire) de Michael Spyres.

LohengrinPG6906presse
© Klara Beck

Durant le prélude, Elsa observe avec un grand télescope la brillante constellation du Cygne et ses étoiles disposées en forme de croix. On y voit également son jeune frère Gottfried et ses amis, courant de part et d’autre sur la scène, laissant Elsa à ses rêves.

Le metteur en scène, Florent Siaud voit l’impasse d’une société qui cherche son unité dans le nationalisme, l’idéologie politique mais aussi mystique, comportant de beaux moment esthétiques mais aussi quelques longueurs notamment dans l’acte 2 lors du duo Telramund et Ortrud qui manque de puissance expressive.

LohengrinGenerale8451presse
© Klara Beck

Dans le décor de ruines grecques de Romain Fabre et superbement éclairé par Nicolas Descoteaux, sous les étoiles de la constellation du cygne, se déroule l’histoire du Chevalier (dans cette mise en scène, chevalier-moine). Une frise antique domine le décor du 1er acte tandis que la statue de la Vénus de Milo se situe au 3e. Le deuxième acte voit le clan du paganisme constitué du couple diabolique, préparant les plans machiavéliques, dans un décor sombre et lugubre, avec quelques pendus.

Une assemblée d’allure un peu sectaire, vêtue d’uniformes militaires aux longs manteaux, d’un bleu profond pour les partisans du Roi et de Lohengrin, noirs pour les contestataires Telramund et Ortrud, évolue sur scène avec une faible direction d’acteurs, contraignant les chanteurs à des poses stéréotypées.

Le grand mérite de ce spectacle est d’offrir au spectateur des symboles immédiatement identifiables, en s’appuyant surtout sur le texte et la musique de Richard Wagner, sans chercher la dérive.

Lohengrin DSF0298 2HDpresse
© Klara Beck

Le plateau vocal est exceptionnel et de haut vol.

Dans le rôle-titre, Michael Spyres trouve une incarnation tout à fait convaincante. Son Lohengrin est exceptionnel. Il possède une puissance confortable, il chante sans effort apparent, et en plus avec un superbe legato et un timbre opulent et magnifiquement projeté, qui rafraîchissent l’interprétation wagnérienne. Sa diction est d’une totale intelligibilité. Son aigu lui autorise des nuances et des subtilités incroyables. Au troisième acte, on est littéralement porté dans un monde ésotérique, tant son interprétation du récit du Graal bouleverse tant vocalement que scéniquement. Un moment de pur bonheur et de félicité !!! On a hâte de le voir à Bayreuth cet été dans le rôle de Siegmund !!!

LohengrinGenerale1362presse
© Klara Beck

A ses côtés, une distribution brillante et de haut vol ! La soprano sud-africaine, Johanni van Oostrum retrouve le rôle d’Elsa qu’elle a interprété récemment à l’Opéra National de Paris. Elle possède une voix de soprano attachante, son timbre est lumineux et ses aigus clairs. Elle incarne une féminité irradiante, sensible et justement exalté, atteignant le sommet au 3e acte.

Quant à Martina Serafin, qui remplaçait en dernière minute Anaïk Morel malheureusement souffrante, elle interprète une Ortrud scéniquement très convaincante, sous les aspects de sorcière (mélange d’Ulrica du Bal Masqué et d’Azucena du Trouvère). Dommage car vocalement, sa voix trop sonore fait entendre un vibrato trop souvent accentué et des aigus trop stridents, proches du cri et vraiment désagréables, surtout au dernier acte où elle est sérieusement en difficulté.

Timo Riihionen campe un Henri l’Oiseleur magnifique, imposant et à la fois paternel. Sa voix de basse est somptueuse et ses graves sonores.

En Telramund, le baryton Josef Wagner offre lui aussi puissance, intensité et véracité à son rôle de mari dominé par son épouse (tel Macbeth), manquant parfois d’un peu plus de noirceur, mais déployant néanmoins une ligne de chant élégante.

Edwin Fardini, dans le Héraut, fait merveille, donnant ainsi un relief rare à son rôle, par son émission puissante et sa grande qualité vocale.

Les chœurs de l’Opéra National du Rhin, renforcés par ceux d’Angers sont, comme d’habitude, très impliqués et réalisent une impressionnante performance, une cohésion et une efficacité dramatique dans les grandes scènes de foule, qui manquent cependant d’un peu plus de direction d’acteurs (mais cela est dû à la mise en scène).

A la tête de l’Orchestre Philharmonique de Strasbourg, le directeur musical Aziz Shokhakimov dirige avec une efficacité irréprochable, réunissant homogénéité et transparence. Dès le prélude abordé très subtilement, presque en apesanteur, il fait preuve de générosité et aussi de théâtralité, tout en assumant les côtés « grand opéra » de la partition de cette œuvre romantique de Richard Wagner. De plus, il déploie ainsi toute la magnificence et la puissance de l’orchestration wagnérienne, mais surtout, toujours respectueusement en phase avec les chanteurs. Il a réussi à sublimer la musique de Wagner.

L’interprétation de Lohengrin dernier opéra de Richard Wagner a suscité des tonnerres d’applaudissements et une standing ovation du public strasbourgeois.

Marie-Thérèse Werling

10 mars 2024

Direction musicale : Aziz Shokhakimov

Mise en scène : Florent Siaud

Décors : Romain Fabre

Costumes : Jean-Daniel Vuillermoz

Lumières : Nicolas Descoteaux

Vidéo : Eric Maniengui

Distribution

Lohengrin : Michael Spyres

Elsa : Johanni van Oostrum

Ortrud : Martina Serafin

Friedrich von Telramund : Josef Wagner

Timo Riihonen : Heinrich der Vogler 

Le Héraut : Edwin FARDINI 

Orchestre Philharmonique de Strasbourg

Chœurs de l’Opéra national du Rhin et d’Angers Nantes opéra

Imprimer
Cookies
Nous utilisons des cookies. Vous pouvez configurer ou refuser les cookies dans votre navigateur. Vous pouvez aussi accepter tous les cookies en cliquant sur le bouton « Accepter tous les cookies ». Pour plus d’informations, vous pouvez consulter notre Politique de confidentialité et des cookies.