Les concerts de musique contemporaine sont de moins en moins nombreux en France et en Europe. Les amateurs doivent les chercher comme jadis les chercheurs d’or. Une fois qu’on les a repérés, il faut se précipiter.
Nous en avons trouvé à Genève. Ils sont donnés par le Lemanic Modern Ensemble. Cet ensemble a été créé en 2007 par le tromboniste et directeur de conservatoire Jean-Marc Daviet et le percussionniste Jean-Marie Paraire. Grâce leur soit rendue !
Les concerts ont lieu dans l’ancien studio de la Radio Suisse Romande où, jadis, le légendaire chef Ernest Ansermet répétait avec son orchestre. On ne pénètre pas en ce lieu sans sentir des vibrations qui remontent à un siècle.
Nous y avons entendu deux pièces contemporaines, Coda de Dusapin et Music for a while de Michael Jarrell. Voilà deux œuvres prenantes, fascinantes même. Cela tient au foisonnement des instruments, aux contrastes orchestraux, à la frénésie rythmique, à l’alternance entre les moments de tension et de détente, bref… au talent des compositeurs. Et cela – le talent – ne s’explique pas : il permet à certains compositeur de nous toucher quand d’autres nous laissent indifférents ! Les deux compositeurs en question appartenaient à la première catégorie.
Le titre de Coda fait référence au terme musical qui signifie « fin ». Et l’on sait que la fin justifie les moyens ! En l’occurrence Dusapin ne ménage pas ses moyens de son orchestre – même si celui-ci est tout à fait classique (bois, cuivres et cordes à un par pupitre).
L’œuvre de Jarrell tire son titre de la célèbre mélodie Music for a while. Le compositeur suisse a en effet utilisé les notes de basse de l’œuvre de Purcell comme notes de départ de sa propre œuvre. Il emploie un éventail de percussions qui va des crotales (petites cymbalettes) frappées avec… une aiguille à tricoter jusqu’à des… ressorts de voiture (C’est comme on vous le dit !) en passant par une variété de toms et de tams, de cloches de vache et autres « rins » japonais.
Un qui fut admirable, ce fut le chef Pascal Rophé, complètement à l’aise dans l’enchaînement de ces mesures qui changeaient sans cesse, de ces rythmes qui se superposaient, s’entrecroisaient, se contrariaient, se bousculaient, se heurtaient. Chapeau à lui ! Chapeau aussi aux musiciens qui semblaient dérouler leur partition avec autant que facilité que s’ils jouaient du Mozart. Ils sont forts, ces musiciens du Lemanic. Ils ont mis le feu au lac!
André PEYREGNE.
Le 7 mars 2024