Le retour de la production de L’Auberge du Cheval Blanc, que Jack Gervais déjà mise en scène in loco en 2007 et en 2015, demeure un spectacle réjouissant qui permet toujours autant au public de faire une cure de bonne humeur et de gaieté !
Certes, les décors et les toiles kitsch représentant tour à tour les célèbres chalets tyroliens sur fond de lac St Wolfgang, la forêt profonde – du Salzkammergut – ou encore la désopilante étable aux vaches, commencent à être quelque peu prévisibles… Les costumes jouent eux-aussi pleinement la carte de la tradition et le défilé de toute la communauté devant son bien-aimé Empereur est l’occasion d’une conviviale harmonie de robes à la ligne parfaite et d’uniformes chamarrés. Mais, au final, le spectateur s’y retrouve et les interprètes y sont tout à fait à leur aise, et c’est là l’essentiel !
Les chorégraphies signées Estelle Lelièvre-Danvers réunissent, une fois encore avec goût et délicatesse, la danse classique, les claquettes et le charleston, rappelant ainsi que le chef d’œuvre de Benatzky mêle avec le métier que l’on sait style viennois, folklore tyrolien, comédie musicale et chanson de cabaret berlinois.
Comme c’était déjà le cas en 2015, le fait de transformer le professeur Hinzelmann (un Dominique Desmons étonnant) en une sorte de Rabbi Jacob s’adonnant avec ses condisciples à une exécution de danse juive, emporte la palme de l’applaudimètre et des rires du public !
La distribution réunie par l’Odéon permet de découvrir la très belle Josépha de Jennifer Michel pour cette prise de rôle. Trouvant exactement le ton juste et sachant conférer au personnage une réelle sensibilité tout en lui conservant son côté femme de tête, éloignée de toute mièvrerie, Jennifer Michel donne à entendre une voix homogène sur tout l’ambitus, avec un aigu particulièrement brillant ! A ses côtés, on a grand plaisir à découvrir le fringuant Léopold de Grégory Benchenafi, lui aussi en parfaite possession de moyens vocaux considérables et qui, tout naturellement compte tenu de ses affinités de répertoire, tire le rôle vers sa dimension cabaret et comédie musicale.
Autour de ce couple particulièrement séduisant, on retrouve l’inénarrable Bistagne d’Antoine Bonelli qui, décidément, ne fait qu’une bouchée du rôle. Le matériau vocal du ténor Marc Larcher permet au rôle de Guy Florès de trouver une dimension que l’on a parfois tendance à oublier ! Jolie brelan de dames pour incarner Sylvabelle, Clara et Kathy grâce aux talents artistiques complets de Charlotte Bonnet, Priscilla Beyrand et Perrine Cabassud. Mention spéciale pour l’Empereur François-Joseph de Claude Deschamps qui, sans les favoris et le caractère paternaliste habituels au rôle, sait lui conférer une belle dimension humaine.
Direction musicale sans surprise mais efficace de Bruno Conti. Comme c’est souvent le cas avec cet ouvrage, on comptait dans la salle plusieurs générations et, en particulier, de jeunes spectateurs, ce dont on ne peut que se réjouir !
Hervé Casini
23 février 2019