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Festspielhaus Baden-Baden : Brillante soirée avec l’orchestre du Gewandhaus de Leipzig, Andris Nelsons et Christiane Karg

Festspielhaus Baden-Baden : Brillante soirée avec l’orchestre du Gewandhaus de Leipzig, Andris Nelsons et Christiane Karg

vendredi 7 mars 2025

©DR

L’orchestre du Gewandhaus de Leipzig, sous la direction de son chef Andris Nelsons, a fait l’honneur au Festspielhaus d’offrir au public une soirée de concert de haut niveau, au cours de laquelle, le public (certes un peu clairsemé) a eu l’immense plaisir d’écouter l’interprétation brillante de la Quatrième Symphonie de Gustav Mahler, dans une révélation quasi céleste.

En première partie de cette soirée exceptionnelle, les musiciens du Gewandhaus de Leipzig ont interprété le troisième des 4 Poèmes symphoniques composés par Antonín Dvořák, d’après les ballades recueil poétique Kytice (le bouquet), intitulé « Le Rouet d’or », conte de fées de Karel Jaromir Erben basé sur l’amour, la trahison, la tromperie, le meurtre et qui, pourtant, connaît une fin heureuse.

Dès les premières mesures de ce poème en quatre mouvements, on a pu entendre le rouet se mettant à tourner, le cliquetis des sabots, puis le son des cors annonçant l’arrivée du roi. Tous les instruments, cordes, flûtes et bois dégageaient des sphères naturelles et féeriques de cette œuvre magnifique et mélodieuse dans une instrumentation incroyablement merveilleuse. Le premier violon mérite une attention particulière dans ses interventions solistes qui frappent par leur délicatesse, presque comme une musique de chambre.

Andris Nelsons, avec son orchestre du Gewandhaus Leipzig magnifiquement rodé, était visiblement ravi de pouvoir exploiter de manière si romantique, féérique la musique tchèque et de transporter le public dans des mondes sonores magiques et oniriques.

Après la pause, c’est la 4e Symphonie de Gustav Mahler qui est au programme. La composition de cette symphonie s’est étalée sur plusieurs années. Elle a débuté pendant les vacances de l’été 1899 mais n’a repris les ébauches qu’à l’été 1900 et il acheva alors la partition en moins de trois semaines. Le quatrième mouvement « Das himmlische Leben » est repris du 5e Lied de Des Knaben Wunderhorn, écrit en 1892. Cette pièce devait faire partie initialement de la 3e symphonie, mais Gustav Mahler décida alors d’en faire le finale de sa 4e symphonie.

Andris Nelsons a donné une interprétation toute particulière de cette symphonie, car dans le premier mouvement, on entend les brillants sons de cloche, puis les violons se sont déployés doucement et gracieusement au rythme du thème chantant des violoncelles merveilleusement riches, suivis des cors et des bois engendrant une conversation orchestrale des plus réussies.

Dans le deuxième mouvement (scherzo bouffon) la musique prend des accents grotesques et parodiques. Le « violon désaccordé » dont le son semble un peu cassant et étrange dans la mélodie « Freund Heins » représente le diable (Mahler disait d’ailleurs que cet instrument était « le violon de la mort » qui conduit le bal). Dans ce mouvement, les hautbois et clarinettes gazouillent, parfois moqueurs, parfois doux, tandis que la harpe s’invite discrètement dans les interludes, créant cette atmosphère féérique.

Quelle magnifique et intelligente direction d’Andris Nelsons à la tête de ses musiciens à la fois si enthousiastes et tellement concentrés.

Dans le paisible troisième mouvement Poco Adagio dans lequel  réside l’ambivalence entre la lumière et l’obscurité, le public est transporté au paradis, grâce à la qualité exceptionnelle de l’Orchestre et les talents artistiques de son chef Andris Nelsons dans le message que voulait faire passer Mahler : lumière et obscurité, résignation et espoir tranquille. Au début, dans une mélodie douce, les cordes élégiaques sonnaient avec sensibilité, puis coulaient très doucement accompagnés des instruments à vent, vers un rêve.

Le quatrième mouvement commence par la phrase « Wir geniessen die himmlischen Freuden » chantée par la soprano Christiane Karg, accompagnée délicatement par les cordes. Elle est apparue, ravissante, gracieuse dans sa robe scintillante. Tout comme sa tenue, sa voix était tout aussi précieuse, son soprano doux et argenté. La clarté pétillante de sa voix fait d’elle une interprète idéale de Mahler. Sa capacité à faire ressortir les nuances du texte du Wunderhorn est particulièrement impressionnante et touchante.

Alors que les notes finales de cette quatrième symphonie s’estompent étirées par la belle direction de Nelsons, le temps semble s’être arrêté. Un instant de silence durant lequel personne n’ose respirer ni applaudir emplit le Festspielhaus d’une étrange et mystique émotion. Ce n’est qu’à ce moment-là qu’éclatent les applaudissements tonitruants. Lors du salut de Christiane Karg, de l’Orchestre et du chef Andris Nelsons visiblement ému, le public ravi et enthousiaste les accompagne de « bravos » bien sonores.

Même si certaines rangées étaient vides, la musique de Mahler avait une plénitude rarement atteinte. En quittant la salle après deux heures de belle musique, le public a emporté un souvenir brillant d’un voyage symphonique dans un monde céleste…

Marie-Thérèse Werling

7 mars 2025

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