Le propos de la pièce :
Les auteurs Constance Meyer, Agathe Peyrard et Sébastien Pouderoux nous proposent, au-delà d’un simple biopic, une ambitieuse fresque autour du couple légendaire du 7ème art que formaient John Cassavetes et son épouse Gena Rowlands.
Leur vie et leur œuvre sont ainsi évoquées, nous permettant d’approfondir et de mieux connaître ces singulières personnalités.
L’ouvrage Cassavetes par Cassavetes écrit par Ray Carney (universitaire et spécialiste du réalisateur) a donné l’idée à nos auteurs de nous montrer les différentes facettes du duo explosif et indissociable formé par John et Gena, qui nous a laissé des chefs-d’œuvre tels Une femme sous influence, Opening night ou bien encore Gloria.
Notre avis :
Le spectacle s’articule autour de trois histoires, qui composeront le spectacle interprété par 8 comédiens qui endossent parfois différents rôles : Marina Hands (Gena), Sébastien Pouderoux (John), Dominique Blanc (Pauline Kael, critique de cinéma), Nicolas Chupin (Peter Falk, acteur) ainsi que Jordan Rezgui – récemment entré dans la troupe – ainsi que deux comédiennes de l’académie de la Comédie-Française (Rachel Collignon et Blanche Sottou) et Antoine Prud’homme de la Boussinière, artiste invité.
Les trois récits se révèlent parfaitement complémentaires : la conception douloureuse d’Une femme sous influence, le regard sévère de certains critiques de cinéma sur les films de Cassavetes, de même que des scènes d’interrogatoires policiers menées à l’encontre de ce dernier, suite à des violences perpétrées à l’encontre d’un de ses anciens chefs opérateurs.
Un espace unique (évoquant selon les besoins de l’intrigue un salon, un studio de télévision ou un commissariat) servira de cadre à cette galerie de personnages – qui nous perdront de temps à autre dans la narration – mais qu’importe : les scènes s’enchaînent et nous passionnent sans conteste grâce au brio des comédiens.
L’habileté de l’entreprise réside dans la volonté de ne pas singer les modèles, mais plutôt de restituer un climat de l’époque bénie de ce cinéma si particulier des années 70.
Marina Hands – toujours royale ! – endosse le rôle de Gena (laquelle vient de nous quitter à l’âge de 94 ans) avec panache, comme elle sait si bien le faire à chacune de ses prises de rôle. Sa beauté, aussi confondante que celle de la muse, se révèle parfaitement convaincante en star façonnée dans l’ombre de son pygmalion.
Sébastien Pouderoux (peut être plus calme que ne l’était Cassavetes) nous touche tout autant par sa fragilité – latente bien que palpable.
Dominique Blanc – véritablement irrésistible en critique vacharde – provoque des rires bienvenus au milieu de situations dramatiques et violentes.
On comprend l’influence que ces langues vipérines pouvaient exercer sur les carrières d’artistes à cette époque !
Nicolas Chupin en Colombo est étonnant : il mérite tous les éloges, à l’image du reste de la distribution – parfaitement équilibrée.
Il s’agit là d’un théâtre instructif et intelligent, qui prend le spectateur comme témoin privilégié d’un Hollywood mythique mais disparu.
Philippe Pocidalo
2 Octobre 2024 –