Matthew Bourne est un chorégraphe anglais que les parisiens avaient eu l’occasion de découvrir dans cette même salle avec son spectacle Edward aux mains d’argent,ainsi qu’à Mogador avec son fameux Swan lake dont la distribution ne comportait que des éléments masculins .
Il récidive quelques saisons après en présentant d’audacieuses adaptations de chefs – d’œuvre tels Casse Noisette ,Cendrillon ou bien encore The Car man.
C’est au tour de Prokofiev avec Romeo + Juliet (présenté entre autres au Sadler’s Wells ) d’être adapté à la sauce Bourne pour notre plus grand plaisir.
Son style reconnaissable – entre ballet-pantomime et show de Broadway -fait une fois de plus mouche avec ce Roméo incarcéré, nous le supposons, dans un asile psychiatrique intitulé The Verona institute.
Abandonné, rejeté par des parents cupides, notre héros croisera tous les protagonistes de la pièce tels Mercutio, Tybalt ainsi que les autres membres des deux clans .La belle Juliette poursuivie par un gardien cupide connaîtra également la souffrance et le harcèlement moral.
Le lever de rideau nous les présente tous vêtus de blanc ; ils dansent au son de la fameuse Danse des chevaliers (que l’on entendra à plusieurs reprises durant spectacle), l’action se situant dans un avenir proche.
Bien plus que l’intrigue connue dans la pièce de Shakespeare, il semble clair que le thème de la répression qui pèse sur notre monde actuel a véritablement captivé Bourne.
Les tourtereaux confinés malgré eux iront jusqu’au bout de leur passion et subiront le sort funeste que l’on sait pour rester unis à jamais.
La beauté et la jeunesse des interprètes apportent une crédibilité supplémentaire à cette tragédie dansée qui nous émeut; pas de temps morts, nous sommes les témoins impassibles d’une tragédie annoncée que seule la passion peut connaître.
Nous eûmes le soir de la représentation les deux magnétiques interprètes que sont Paris Fitzpatrick et Monique Jonas. Ils cochent toutes les cases : jeunesse, beauté et talent – l’émotion est palpable – l’accueil du public (par ailleurs assez jeune ) triomphal.
L’orchestration de Terry Davies qui dans un premier temps étonne donne au spectacle une modernité et un ton grave très certainement voulus par Bourne ; la musique de Prokofiev semble plus que jamais le moteur de cette tragédie éternelle et désormais universelle.
Philippe Pocidalo
14 mars 2024
https://www.chatelet.com/programmation/2023-2024/romeo-and-juliet/
Direction artistique et chorégraphie : Matthew Bourne
Musique : Sergueï Prokofiev
Décors et costumes : Lez Brotherston
Lumières : Paule Constable
Orchestration : Terry Davies
Création sonore : Paul Goothuis
Associée à la direction artistique : Etta Murfitt
Associée à la chorégraphie : Arielle Smith
Romeo : Paris Fitzpatrick
Juliet : Monique Jonas
Tybalt : Danny Reubens
La compagnie : Matthew Amos, Tanisha Addicott, Tasha Chu, Carla Contini, Adam Davies, Anya Ferdinand, Jackson Fisch, Cameron Flynn, Euan Garrett, Kurumi Kamayachi, Daisy May Kemp, Hannah Kremer, Kate Lyons, Rory Macleod, Blue Makwana, Leonardo McCorkindale, Eleanor McGrath, Enrique Ngbokota, Harry Ondrak-Wright, Alan Vincent