Où peut-on entendre, dans le monde, des grands quatuors à cordes ? A Paris, à Berlin, à Vienne, à New-York ? Non : dans le Var, au pays de Fayence. Les concerts et festivals de quatuors sont de plus en plus rares, et la crise sanitaire n’arrange rien. On a, dans Var, un festival qui, depuis trente deux ans, s’intéresse à ce genre si exigeant de la musique classique. Chérissons le !
Lorsque l’été finit, les mélomanes parcourent les paysages dorés du haut Var, vont d’église en église dans les villages perchés. Au milieu des vieilles pierres se répand le bonheur de la grande musique. Que demander de plus ?
Malgré les difficultés engendrées par la crise sanitaire, le festival a bel et bien eu lieu et a tenus ses promesses. On y assisté masqué, les mains lavées au gel hydroalcoolique, sans personne assis à côté des groupes constitués. Mais, le principal : la musique était là, avec des musiciens en chair et en os, et un public pour la partager.
Nous avons entendu des quatuors d’élite :
– le Quatuor Schumann, en l’église de Tourrettes : union parfaite entre les musiciens dans le phrasé, l’intensité, les respirations, les nuances, la virtuosité,
– le Quatuor Voce à Seillans : là encore, une perfection technique mais aussi quelque chose de beau, d’intense, dans le son et les intentions,
– le Quatuor Esmé : la découverte de quatre jeunes Coréennes en l’église de Callian qui jouent avec une époustouflante énergie, qui font des étincelles tout au long de leur parcours.
(Nous n’avons pas entendu le Quatuor Tana et le Quatuor Szymanowki, qui faisaient également partie du festival).
Le directeur du festival est Frédéric Audibert, cet excellent violoncelliste niçois qui enseigne aux conservatoires de Nice et de Monaco. Malgré les difficultés, il n’a pas baissé les bras et, aidé par les maires les plus entreprenants du Pays de Fayence, il a maintenu à flot son festival. Sachons lui gré.
Lors d’un concert donné en la petite chapelle de Callian – que l’on atteint au bout d’un parcours sinueux au milieu des ruelles du vieux village – il s’est lui-même joint au Quatuor Voce pour nous faire découvrir un quintette d’Onslow. Ce compositeur dont on jurerait qu’il est anglais – et dont le nom nous donne l’illusion d’entendre « On se fait un slow ? » – est né et mort à Clermont-Ferrand au XIXème. Dans la cité qui n’était pas encore le fief de Michelin, il a composé un quintette « cinématographique » dans lequel il décrit un accident de chasse, la convalescence et la guérison du blessé.
Pittoresque diversion au milieu des quatuors de Beethoven qu’on a inévitablement entendus en cette « Année Beethoven » –et que, bien sûr, on ne se lasse pas d’entendre !
André PEYREGNE