Nice : une heure d’éternité
Les grands concerts ne se déroulent pas tous dans les grandes salles. A Nice, dans la rue Saint François de Paule qui, pour ceux qui connaissent la ville, est celle de l’Opéra, ce n’est pas à l’Opéra que nous nous sommes rendus mais dans l’église qui se trouve en face et dont la rue porte le nom. Une affiche placée sur un tréteau sur le parvis proposait un concert Bach à la foule polyglotte des touristes que l’approche de l’été jette avec force dans le Vieux-Nice. On procède ainsi, à l’entrée des églises, dans les villes touristiques qui aiment la musique comme Venise ou Prague.
On entre et c’est la surprise. Ici ce fut la bonne, l’excellente surprise ! Le concert était donné par un ensemble vocal niçois formé il y a deux ans, répondant au nom de Vocalliances. Oh, la belle homogénéité, le bel équilibre des voix ! L’agréable rondeur des phrasés, la clarté des contrepoints ! L’ensemble était placé sous la direction d’un chef qui connaît son métier depuis longtemps – un chef comme on aimerait en voir beaucoup à la tête des chorales de France : Jean-Pierre Grégoire. Dans le monde des chefs de choeurs où, bien souvent, la bonne volonté tient lieu de talent, lui est un vrai chef. Ayant exercé son métier en Provence, en Polynésie, à l’Ile Maurice (où il a créé le conservatoire), au conservatoire de Nice, cet homme a passé sa vie à faire le bien autour de lui.
Ce concert était le symbole de sa réussite. Il fit passer l’émouvant message de la musique et de la foi au travers des deux Cantates BWV 4 et 104 dont la beauté faisait vibrer les voûtes baroques de l’église. La mezzo-soprano Cristina Greco qui, elle venait du trottoir d’en face (du chœur de l’opéra), donna de la consistance et de la patine aux volutes des belles phrases de Bach.
Comme les moyens financiers ne permettaient pas d’avoir un orchestre, il avait été fait appel au sauveteur musical des situations impossibles, l’organiste Stéphane Eliott, sorte d’homme-orchestre qui joue avec une incroyable virtuosité sur un synthétiseur perfectionné.
Le concert était joliment intitulé Cantates pour l’éternité. Eh bien oui, on eut droit à une heure d’éternité…
André PEYREGNE
10 Juin 2023
