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Le comte Ory Opéra de Monte-Carlo

Le comte Ory Opéra de Monte-Carlo

jeudi 25 février 2021
Maxim Mironov, Rebecca Olivera et Cecilia Bartoli – Photos Alain Hanel

Opéra de Monte-Carlo : Quand le comte Ory conte fleurette 
Changement de ton radical à l’opéra de Monte-Carlo où la pochade gaillarde du Comte Ory succédait au parcours mystique de Thaïs
Cette galipette rossinienne à mi-chemin entre l’opéra-bouffe et l’opéra-comique connut lors de sa création un fantastique succès et fut jouée plus de quatre cent fois jusqu’à l’année 1884. 
Quel génie tout de même que ce Rossini, et si l’on y regarde de plus près, quel précurseur ! En écoutant les arabesque syllabiques du cast monégasque et les parlandos soutenus par les cordes, une évidence s’impose…Le créateur du genre « rap » n’est autre qu’un certain Gioacchino Rossini.
La magistrale mise en scène de Patrice Caurier et Moshe Leiser émaille les aventures égrillardes du Comte Ory de clins d’œil paillards plus ou moins osés. La très drôle collecte de lingeries en tout genre abandonnées par les jeunes visiteuses lors de leur « consultation » de l’ermite, l’intérieur de la roulotte dudit ermite semblable à un lupanar cinq étoiles, ou encore les mimiques pour le moins expressives des chevaliers campent une atmosphère presque rabelaisienne, en tout cas bien représentative d’un esprit français jouissif et déluré qui préfigure les libérations de notre société moderne.  Le propos semble être replacé après-guerre, sans doute pendant la guerre d’Algérie et un portrait du général de Gaulle jeune et en uniforme vient  rappeler le contexte guerrier des péripéties et l’exil des maris partis pour se battre…
Sur le plateau, Cecilia Bartoli impose sa classe et son inégalable charisme. Certes le temps a passé, et la pyrotechnie rossinienne est peut être un peu moins intense, mais la démonstration de diction et d’agilité vocale dans un rôle initialement dévolu à une soprano est tout simplement époustouflante. Maxim Mironov (Le Comte) lui conte fleurette avec une élégance de ton de tous les instants, des aigus percutants et enjôleurs et une belle assurance scénique. Le poids de l’expérience est manifestement perceptible dans la prestation solidement assumée de Pietro Spagnoli (Raimbaud) tandis que Nahuel Di Pierro (Le gouverneur) affiche des graves profonds mais semble parfois rythmiquement un peu à la traîne. Le reste de la distribution est plus en retrait, les incarnations de Rebeca Olivera (Isolier) et surtout Liliana Nikiteanu (Ragonde) peinant à se hisser au niveau de celles de leurs partenaires. 
Dans la fosse, Jean-Christophe Spinosi démarre son discours tambour battant et impose à la phalange des Musiciens du Prince une lecture guerrière et pleine de relief, une explosion de jouissance bien éloignée du badinage grivois et de la fluidité que l’on pourrait attendre de la pièce. Mais par la suite le dynamisme s’infléchit et trouve les justes équilibres pour rendre justice à la partition de ce Comte Ory, un ouvrage complexe dont l’architecture flirte avec deux genres sans vraiment en choisir un.  
Gros succès et grands sourires dans le public pour cette production rafraîchissante et bien venue en ces temps si difficiles et final endiablé lorsque, de la scène et sous les ovations, .le chef reprend et dirige à deux reprises lors des saluts les ultimes mesures de l’opéra.

Yves Courmes. 

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