Il est dans l’arrière-pays niçois un charmant village qui se singularise dans le panorama du théâtre musical de l’hexagone : Gattières.
Depuis des décennies, Opus Opéra y propose chaque été (magnifique exploit !) un ouvrage lyrique et, à cet égard, il faut d’entrée saluer l’appui indéfectible de la municipalité et aussi l’aide précieuse apportée par le Département comme par la Région qui ont compris le sens de cette heureuse initiative culturelle menée avec courage, perspicacité, dévouement et efficacité par l’association de bénévoles « Opus Opéra » avec à sa tête l’inlassable présidente Élisabeth Blanc* .
Seulement 4.000 habitants et pourtant un festival qui dure depuis 32 ans ( ! ) : une sorte de record qui n’a que peu d’exemples d’autant que nombre de personnalités éminentes s’y sont illustrées. Il n’est que de citer – entre autres – le regretté baryton Franck Ferrari, Stuart Maunder administrateur artistique de l’Opéra de Sydney puis membre de l’équipe directoriale du Royal Opéra House de Londres, Alain Garichot l’un de nos meilleurs metteurs en scène d’opéra, la soprano Anaïs Constans qui s’illustre aujourd’hui dans une brillante carrière etc.
On aura apprécié – pour ne prendre que ces toutes dernières années – un émouvant Rigoletto avec Pierre-Yves Pruvot et Amélie Robins, puis une fort séduisante Périchole avec Marie Kalinine et Xavier Flabat.
Deux productions remarquablement mises en scène par Guy Bonfiglio qui s’est investi à nouveau cette année dans une trépidante Fille du Régiment de Donizetti (habilement transposée dans les années 30/40) qui regorgeait de clins d’œil, de gags bienvenus, de références cinématographiques et empreinte d’un bout à l’autre d’un humour de bon ton et particulièrement communicatif.
Chaque année le Festival de Gattières parvient, en outre, à s’améliorer sur bien des aspects pour approcher un professionnalisme qui pourrait être envié par des scènes plus ambitieuses. Sous la houlette de Bruno Habert le chœur, composé d’éléments jeunes, a encore progressé, la scénographie s’est significativement enrichie, une nouvelle équipe lumières a incontestablement apporté un plus qui a contribué à l’amélioration du spectacle.
Un événement a marqué notablement cette nouvelle édition avec la venue du Cercle Richard Wagner Rive Droite Nice présidé par Yves Courmes qui a souhaité « privatiser » partiellement une représentation afin de célébrer (avec un an de retard pour raisons de Covid) son 10e anniversaire. Plus de deux cents membres du Cercle et leurs invités ont donc assisté à la dernière soirée qui comptait de nombreuses personnalités au rang desquelles Bertrand Rossi directeur général de l’Opéra de Nice, Marc Concas délégué à l’Opéra de Nice, président de la Régie de l’Opéra et représentant le maire de Nice, Auguste Vérola représentant le président du Conseil départemental des Alpes Maritimes, les représentants de la municipalité de Gattières, Philippe Olivier écrivain, spécialiste de l’histoire de la musique et conférencier international, Philippe Arlaud prestigieux metteur en scène notamment au Festival de Bayreuth, Andréa Buchanan, Vice-présidente du Verband international, Bruno Membrey, chef d’orchestre, Alexandre Heyraud, décorateur, Amélie Robins soprano et Diego Godoy ténor tous deux boursiers du Cercle Richard Wagner Rive Droite etc…
Personnalités et spectateurs se sont accordés pour louer cette belle initiative d’ «opéra au village », d’autant que cette Fille du Régiment s’est déroulée avec autant d’entrain que de soins aussi bien sur le plan du chant que du théâtre.
Comme on l’a dit la direction d’acteurs de Guy Bonfiglio est extrêmement précise et fourmillante d’idées et permet à l’ensemble des protagonistes, tous particulièrement doués pour la comédie, de s’exprimer avec verve et esprit. La principale qualité de la troupe étant son homogénéité comme sa parfaite musicalité on englobera dans une louange unanime Jeanne Crousaud (subtile et attachante Marie à l’impeccable ligne de chant), Hoël Troadec (suave, dynamique et juvénile Tonio), Jean-Christophe Brun (débonnaire et sonore Sulpice servant avec une saveur gourmande les dialogues ciselés à la manière d’Audiard), Gosha Kowalinska (superbe et exubérante marquise de Berkenfield), Elisabeth Aubert, également responsable des costumes, (pittoresque Duchesse de Crakentorp), Maxime Martelot (extravagant Hortensius) sans oublier évidemment l’ineffable Claude Deschamps (fils de la Duchesse) et ses inénarrables dons comiques qui a également réglé avec le talent qu’on lui connaît la chorégraphie omniprésente dans le spectacle. Le festival Opus Opéra a su également s’attacher d’excellents instrumentistes sous la baguette experte de Franck Villard. Un ensemble uni et cohérent générateur d’une réjouissante réussite.
Le succès était naturellement une fois de plus présent à cet incontournable rendez vous de Gattières et, compte tenu de tous les nouveaux ingrédients dont bénéfice désormais le Festival, on a hâte de découvrir le titre du nouvel opéra qui sera proposé par l’équipe enthousiaste d’Opus l’été prochain et qui marquera, à n’en pas douter, une nouvelle montée en puissance de cette manifestation chère au cœur des mélomanes de notre région.
Christian Jarniat
23 juillet 2021
* A l’occasion de Festival 2021 Élisabeth Blanc a présenté son livre récapitulant les 32 ans de productions d’opéra à Gattières.