Le Festival d’opérette et de comédie musicale de Nice, qui s’est ouvert au mois de septembre 2018 avec « My Fair Lady » a affiché un spectacle par mois et ce, jusqu’en décembre sur une commande de la ville de Nice au profit des séniors, était proposé de fêter Noël avant la lettre avec l’évocation de quelques-unes des plus célèbres comédies musicales de Broadway… et d’ailleurs, mises en scène et chorégraphiées par Serge Manguette
La chanteuse italienne Giulia Tosoni, lauréate de la coupe d’Italie des artistes de variétés et de comédie musicale et qui s’est spécialisée dans ces deux disciplines, a démontré au cours de cette matinée que « Cabaret », « New York, New York » ainsi qu’ « Hello Dolly ! » convenaient parfaitement à son tempérament comme à sa voix longue et prenante de parfaite musicienne doublée d’une excellente danseuse. L’Opéra de Nice accueillait un autre chanteur italien, également spécialiste de la comédie musicale, Heron Borelli, lequel s’est illustré au cours de sa carrière notamment dans « Notre-Dame de Paris » en incarnant pendant près de dix années Gringoire mais aussi Phoebus. Parmi ses autres prestations on relève notamment « Le Comte de Monte Cristo », « Othello opéra rock », et « Hamlet », la comédie musicale de Daniele Martini. Ce séduisant showman – par ailleurs directeur artistique, professeur de l’école musicale de Modena et membre du groupe musical « The Italian Singers » – au physique de rock star sait également, le temps de ce spectacle, saisir l’ambiguïté de son héros torturé dans « Jekyll & Hyde » de Frank Wildhorn pour le crucial « This is the moment ». « Le temps des cathédrales », ou le trio de « Belle » de « Notre-Dame de Paris » (avec Serge Manguette et Pietro Mattarelli) n’ont évidemment plus de secrets pour lui et il nous gratifie en outre de « Your song » et – en duo avec Giulia Tosoni – de « Come what may », deux extraits de la toute nouvelle comédie musicale de Broadway « Moulin Rouge » d’après le film de Baz Luhrmann. Le public a également apprécié la prestation toute en rondeur et bonhomie du jeune Pietro Mattarelli qui vient de terminer une série de « Robin Wood », comédie musicale de Beppe Dati. Dans le rôle du Génie du musical « Aladin » d’Alan Menken il fait preuve d’un dynamisme débordant avec claquettes à l’appui d’autant que l’air « Friend like me » est une sorte de pot-pourri en forme de clin d’œil malicieux au swing des années 1930-40. Il donne encore libre cours à son exubérance dans deux extraits de « Chantons sous la pluie » en duo avec Serge Manguette (« Fit as a fiddle » et « Moses supposes ») ainsi que dans le fameux « I got rythm » d’ « Un Américain à Paris ».
La performance de Laeticia Goepfert suscite véritablement l’admiration. Après sa remarquable Comtesse de « Valses de Vienne » elle a, une fois de plus, affirmé avec brio son aisance à passer d’un genre et d’un style à l’autre démontrant, à chacune de ses interprétations, un haut niveau de qualité dans le chant, le théâtre et la danse. Voilà une artiste – au sens plein du terme – parée d’un physique de rêve, qui sait transmettre au public une émotion vraie par une sensibilité hors pair, un jeu d’une exceptionnelle justesse et une voix au timbre d’une belle richesse. Un bonheur que confirment ses deux Maria : celle frémissante de « West Side Story » dans le duo « Tonight » avec Heron Borelli et celle attendrissante de « La Mélodie du bonheur ». Poignante dans Fantine des « Misérables » (« J’avais rêvé d’une autre vie »), radieuse dans « My Fair Lady » (« J’aurais voulu danser »), sensuelle dans « Chicago » (« Nowadays ») en duo avec Giulia Tosoni, lascive dans sa danse d’Esmeralda de « Notre Dame de Paris », exaltée dans Christine du « Fantôme de l’Opéra », superbe vocalement dans une « Giuditta » de Franz Lehar (« Meine Lippen ») de haute volée… Cela s’appelle : le talent !
Le spectacle s’est terminé par un vibrant « Hallelujah » de Leonard Cohen repris en chœur par une salle conquise. Nathalie Agomeri 5 décembre 2018