Ludovic Tézier, baryton exceptionnel, immense interprète de Verdi, sait tout sublimer et transformer en or tout ce qu’il chante, de Mozart à Verdi, et maintenant Wagner, en passant par des lieder et le répertoire français.
Ce soir, il a illuminé l’opéra de Lyon dans un programme époustouflant : les Dichterliebe de Robert Schumann, quatre chansons de Don Quichotte de Jacques Ibert, et pour clôturer (avant les 3 bis) les Wesendonck Lieder de Richard Wagner. Il était merveilleusement accompagné par le pianiste (et complice) Julius Drake.
Ce soir à Lyon, ce voyage en musique est composé de lieder, de mélodies qui subliment harmonieusement les rapports entre les mots et les notes.
La première partie, consacrée au lied romantique, accorde à Schumann l’exclusivité de ce voyage germanique. Composée sur 16 poèmes d’Heinrich Heine, cette œuvre de Robert Schumann date de 1840 et raconte la mort tragique d’un poète amoureux. C’est aussi l’un des cycles les plus aboutis du compositeur. Si Ludovic Tézier prononce les consonnes allemandes avec une certaine douceur, les syllabes sont exprimées avec force et une articulation précise. Les deux Lieder « Ich hab’im Traum geweint » et « Wenn ich in deine Augen seh », accompagnés par le piano d‘une délicatesse exquise de Julius Drake, sont vifs et intenses. Le baryton de Ludovic Tézier est tout simplement superbe, son style lyrique grandiose, la brillance toujours présente. Un moment d’enchantement.
Après la pause, la seconde partie débute avec les quatre chansons de Don Quichotte, mises en musique par Jacques Ibert. Elles datent de 1932 et ont été composées pour le film de Georg Wilhelm Pabst, une adaptation plutôt libre du chef d’œuvre de Cervantès. Le piano devient tantôt percussions, tantôt guitare, la musique se colore de quelques accents espagnols. La manière dont Ludovic Tézier chante Don Quichotte est d’une beauté envoûtante : on retrouve son timbre de velours, ses médiums riches et ses aigus lumineux. Son articulation en français s’associe à une compréhension intime du texte, jusque dans son moindre détail. Pour moi, c’est la dernière chanson « La mort de Don Quichotte » qui m’a le plus émue. Il s’est exprimé avec le plus de conviction et d’engagement, tirant le tempo à l’extrême…. On aurait voulu être Dulcinée !!!
Après l’intermède au piano seul, Julius Drake nous a ravis avec la Romance sans paroles op 62 et op 38. Un moment de calme et sérénité.
On a tellement l’habitude d’entendre les Wesendonck Lieder de Richard Wagner, chantés par des voix féminines. Ludovic Tézier les a interprétés avec beaucoup de profondeur, sublimant à merveille la référence au futur Tristan. « Traüme » était tout simplement sublime, d’un immense romantisme, tellement humain. Chaque mot chanté laisse imaginer le paysage, la maison à Tribschen.
Des tonnerres d’applaudissements ont salué la performance de Ludovic Tézier, qui, pas avare de bis, a interprété un lied de Schubert, puis très gai l’air à boire du Don Quichotte de Ravel et pour terminer, la voix bien chauffée, il a chanté le grand air wagnérien (le tube) extrait de Tannhaueser : « Oh du mein holde Abendstern » la romance à l’étoile, qu’il a dédiée avec beaucoup d’émotion dans la voix, à ceux qu’il a connus à ses débuts à l’opéra de Lyon et qui ne sont plus là.
Cette « romance à l’étoile, finement chantée, laisse entrevoir la lignée des héros wagnériens : Telramund, Hans Sachs, et certainement un jour Wotan…..
Merci à Ludovic Tézier de nous avoir offert un programme d’une grande finesse avec une virtuosité exceptionnelle. Il faudrait inventer de nouveaux mots pour dire l’admiration que cet immense artiste suscite.
Marie-Thérèse Werling
25 octobre 2025
Une information non dépourvue d’intérêt. Le film « Ludovic » réalisé par René Letzgus sortira en avant-première le mercredi 3 décembre 2025 au CINE PATHE – place de la Porte Maillot à Paris, et dans tous les cinémas de France le mercredi 21 janvier 2026. Une soirée exceptionnelle sera programmée au cinéma « LE TREFLE » à Dorlisheim et soutenue par le Cercle Richard Wagner de Strasbourg.
