Johann Sebastian Bach :
Cantate BWV 66 « Erfreut euch, ihr Herzen »
Cantate BWV 134 « Ein Herz, das seinen Jesum lebend weiß »
Oratorio de Pâques (Osteroratorium), BWV 249
A l’occasion de notre chronique dans ces colonnes de la Passion selon saint Matthieu, donnée vendredi au Festival de Pâques d’Aix-en-Provence, nous évoquions le précieux souvenir de celle dirigée par Christophe Rousset lors de l’édition 2023 de la manifestation. Deux ans plus tard, le chef revient en terres aixoises, pour un autre programme Johann Sebastian Bach, en compagnie de son orchestre des Talens Lyriques et à nouveau le Chœur de chambre de Namur.
Si les trompettes, au début de la première des deux cantates « Erfreut euch, ihr Herzen », semblent faire preuve de prudence, présentes certes mais pas étincelantes, l’ensemble musical séduit sans retenue. Les cordes sont vives et donnent du mordant, mais sans agressivité aucune… et quel formidable et impressionnant jeu du basson au cours du premier chœur « Erfreut euch, ihr Herzen » ! Le Chœur de chambre de Namur ne faillit pas à sa réputation, qui assure cohésion rythmique et expressivité dans leurs interventions, des choristes aussi bien équilibrés par pupitres séparés que dans leur globalité. Jouant sur copies d’instruments d’époque, Les Talens Lyriques font quant à eux couler, avec sérénité, une musique qui présente une agréable rondeur de son.
Sans doute en raison du remplacement d’Edwin Crossley-Mercer, qu’il effectue ce soir, le baryton-basse Adrien Fournaison ne semble pas idéalement épanoui pour entamer son air « Lasset dem Höchsten ein Danklied erschallen », avec son regard qui ne quitte pas un instant la partition. Mais l’instrument est suffisamment souple pour passer l’agilité, tandis qu’il faut quand même régulièrement tendre un peu l’oreille pour bien entendre la voix, ce déficit passager de puissance étant d’ailleurs commun à l’ensemble des quatre solistes. Plus loin, le duo entre alto et ténor est charmant, avec en particulier la voix chaude de Mari Askvik, qui sait véhiculer l’émotion, pendant que le violon solo exécute d’interminables traits de virtuosité.
Dans la cantate « Ein Herz, das seinen Jesum lebend weiß » qui suit, Nick Pritchard est mis davantage à contribution, ténor léger mais doté d’une bonne extension vers l’aigu pour dérouler son air « Auf, Gläubige, singet die lieblichen Lieder ». Le duo ténor – alto « Wir danken und preisen dein brünstiges Lieben » bénéficie d’une introduction musicale d’un relief séduisant, le chef variant les nuances en diminuant par séquences l’épaisseur de son orchestre afin de favoriser les voix, avant que le chœur ne soit sollicité, uniquement dans le numéro final.
Après l’entracte, c’est au tour de l’Oratorio de Pâques BWV 249, avec d’emblée les trois trompettes qui brillent dans la Sinfonia, aux côtés des timbales. La vélocité initiale contraste avec le deuxième numéro, instrumental lui aussi, un adagio lent et triste, à l’image du hautbois solo. Deux étoiles brillent dans l’air « Seele, deine Spezereien » : la soprano Anna El-Khashem à l’intonation précise et au chant particulièrement aérien, mais également la flûte traversière qui conduit un solo extrêmement étendu. L’air pour ténor « Sanfte soll mein Todeskummer » (« Le passage de ma mort me sera doux, juste un sommeil ») interprété avec une délicate douceur par Nick Pritchard peut justement nous rappeler, par son ambiance vaporeuse, l’air du Sommeil d’Atys de Lully. Le chœur final et ses départs en canon fait forte impression et, à la demande d’un public ravi, est bissé par les artistes.
Irma FOLETTI
Direction musicale : Christophe Rousset
Anna El-Khashem, soprano
Mari Askvik, alto
Nick Pritchard, ténor
Adrien Fournaison, baryton
Les Talens Lyriques
Chœur de chambre de Namur